Bienvenue à Chroniques Timbres Poste


Chroniques Timbres Poste est un blog culturel qui vous invite à explorer la richesse des émissions philatéliques et à vous immerger dans les récits captivants qu'elles révèlent.

Le timbre-poste du mois

Chaque mois, Chroniques Timbres Poste propose l'analyse d’un timbre issu du patrimoine postal.


Novembre 2025

Saint Martin de Tours : 1600 ans de charité célébrés par La Poste

Lorsque revient le mois de novembre, la lumière décline et la nature s’apprête au repos. Les hommes se réunissent pour trouver, dans la chaleur et la clarté des foyers, un rempart contre la saison sombre. Au cœur de cette période se célèbre la fête de la Saint-Martin, le 11 novembre, en mémoire de saint Martin de Tours.

 

Le timbre-poste présenté ce ci-dessous a été émis par la France le 7 juillet 1997. Il commémore le 1600ᵉ anniversaire de la mort de saint Martin de Tours, une figure emblématique de la culture européenne :

L’illustration a été conçue par Jean-Paul Cousin et s’inspire de l'enluminure d'un manuscrit du XIVe siècle représentant le partage du manteau de saint Martin : 

Saint Martin partageant son manteau, enluminure réalisée par Richard de Montbaston vers 1348. 

Bibliothèque nationale de France, ms. Français 241, fol. 300v Gallica.bnf.fr.

La gravure en taille-douce a été réalisée par Claude Jumelet, qui restitue avec justesse la richesse et l’éclat de l’enluminure médiévale.

 

La représentation évoque le plus célèbre épisode de la vie de saint Martin de Tours, dont voici le récit.

Le partage du manteau de saint Martin

Martin (Martinus) naquit vers 316 en Pannonie, une province de l’Empire romain (actuelle Hongrie). Enfant, il grandit à Pavie (Ticinum), dans la Gaule cisalpine, où son père exerçait la charge de tribun militaire.

Élevé dans l’ombre des camps et des enseignes romaines, Martin grandit au rythme de la discipline et du fer. À quinze ans, il dut revêtir la tunique du soldat, obéissant à la loi de l’Empire qui voulait que les fils suivent le destin de leurs pères.

 

Un jour d’hiver, comme il passait sous une des portes d’Amiens, il rencontra un pauvre qui était tout nu. Aussitôt, coupant en deux, avec son épée, le manteau dont il était recouvert, il en donna à ce pauvre une des deux moitiés. Et, la nuit suivante, il vit le Christ lui-même vêtu de cette moitié de manteau ; et il entendit que Notre-Seigneur disait aux anges qui l’entouraient : “ Ce manteau, Martin me l’a donné quand il n’était encore que catéchumène ! ”[1]

 

Peu après, Martin reçut le baptême, quitta l’armée et devint évêque de Tours. Il y fonda le monastère de Marmoutier, un des plus anciens d’Occident.

Sur le timbre, on voit Martin monté sur son cheval, vêtu d’un manteau bleu et d’une tunique rouge. Son visage est auréolé de lumière — signe de sa sainteté. Il tient dans sa main droite une épée dont il se sert pour partager son manteau :

Le mendiant, à demi nu, se tient à ses côtés et le regarde avec gratitude. Sa nudité souligne son extrême détresse, alors que le froid s’installe pour plusieurs mois :

Les motifs géométriques rouges et dorés en arrière-plan évoquent les riches enluminures des manuscrits du Moyen Âge. Cette ornementation confère à la scène une dimension à la fois spirituelle et patrimoniale.

 

Cette composition résume à elle seule le message universel de la légende de saint Martin : le vrai courage ne réside pas dans la guerre, mais dans la compassion.

L’héritage universel de saint Martin de Tours

Vénéré comme protecteur des rois, des pauvres et des soldats, saint Martin de Tours incarne l’idéal chrétien de charité tel qu’on le concevait au Moyen Âge.


Il demeure toujours une figure majeure du patrimoine français : plus de 500 communes en France portent son nom. Selon la tradition, le roi Clovis serait venu prier sur sa tombe avant de se convertir au christianisme.

 

L'influence de saint Matin a aussi dépassé les frontières de la France : saint patron de la Hongrie, son culte s’est diffusé dans toute l’Europe occidentale, faisant de lui l’une des figures spirituelles les plus unificatrices du continent.

Les derniers beaux jours de l'automne

L’été de la Saint-Martin désigne une période de beau temps survenant chaque année autour du 11 novembre. Selon la tradition, ce redoux était perçu comme une bénédiction, rappelant le geste de Martin partageant son manteau.


L’expression est restée dans le langage courant pour désigner les derniers beaux jours de l’automne, avant l’arrivée de l’hiver.


En Amérique du Nord, une période similaire est connue sous le nom d’été des Indiens.

 

***

 

À travers le timbre-poste Saint Martin de la Gaule à la France 397-1997, c’est tout un héritage culturel et spirituel que la poste française a célébré : celui d’un homme dont le geste a traversé les siècles pour incarner la chaleur de la générosité humaine.

R. Simard

[1] Jacques de Voragine, La Légende dorée (1261-1266), traduit du latin par Théodore de Wyzewa, Paris, Perrin et Cie, 1910, p. 618-627. Texte disponible sur Wikisource.


Octobre 2025

L’Algérie rend hommage à la mémoire palestinienne

En 2025, la situation diplomatique au Proche-Orient reste extrêmement tendue, notamment dans la bande de Gaza, où les affrontements se sont intensifiés malgré des efforts diplomatiques en cours.

 

Le 5 octobre, des frappes israéliennes ont causé la mort d’au moins 24 Palestiniens, alors même que des négociations étaient prévues en Égypte autour d’un plan de cessez-le-feu soutenu par les États-Unis.

 

Sur le terrain, la population civile subit une crise humanitaire sans précédent : l’ensemble des habitants de Gaza est en situation d’insécurité alimentaire grave et de nombreuses infrastructures essentielles ont été détruites ou gravement endommagées.

 

Rappelons qu’à la suite de la proclamation de l’État d’Israël, le 14 mai 1948, entre 700 000 et 800 000 Palestiniens furent contraints de fuir ou furent expulsés de leurs terres et villages.

 

Cette tragédie, connue sous le nom de Nakba (النكبة), c’est-à-dire « la catastrophe » en arabe, s’accompagna de la destruction de plus de 400 villages et marqua le début d’un exil toujours en cours pour beaucoup.

 

Alors que la communauté internationale multiplie les appels à la désescalade, la réalité sur place pour les habitants demeure marquée par la violence, la précarité et une profonde incertitude politique.

Le 75ᵉ anniversaire de la Nakba

Émis le 24 mai 2023, ce timbre-poste algérien rend hommage au 75e anniversaire de la Nakba :

À travers une composition à la fois sobre et puissante, le timbre illustre la mémoire collective et la résistance culturelle du peuple palestinien en exil depuis plus de sept décennies. À gauche, on remarque une clé enveloppée d’un keffieh noir et blanc :

Popularisé par Yasser Arafat, dirigeant historique de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), le keffieh noir et blanc incarne l’unité nationale et la résistance du peuple palestinien face à l’occupation. Le noir et le blanc évoquent également les racines rurales et populaires du mouvement palestinien, notamment en Cisjordanie, d’où ce modèle est originaire.

 

La clé représente les maisons que les Palestiniens ont dû abandonner. Elle incarne la mémoire du déracinement, transmise de génération en génération, et représente pour beaucoup l’espoir d’un retour, d’une justice historique et d’une reconnaissance des souffrances vécues.

 

À droite, la mosquée Al-Aqsa, située à Jérusalem, est le troisième lieu saint de l’islam, après La Mecque et Médine :

Au-delà de sa valeur religieuse, cette mosquée est devenue un emblème de l’identité palestinienne et de la résistance face à l’occupation. Elle incarne la souveraineté palestinienne sur Jérusalem, ville revendiquée comme capitale, et son image exprime la volonté de préserver la présence palestinienne dans la cité.

 

Les inscriptions en arabe, en anglais et en tifinagh témoignent de la diversité linguistique et culturelle de l’Algérie ; le tifinagh est l’alphabet traditionnel des Amazighs (Berbères), peuple autochtone d’Afrique du Nord :

Son utilisation sur un timbre-poste est un symbole fort de l’identité amazighe et exprime la fierté et la continuité de cette civilisation millénaire.